Une première de Boris Eifman pourrait ressembler à un accouchement. Quelque chose de merveilleux est en train de prendre forme et c’est le cas du dernier ballet du chorégraphe, adaptation de La Mouette de Tchekov présenté en première à Saint-Petersbourg la semaine dernière. En deux actes, au delà de l’illusion et la chute qui composent l’intrigue, Eifman met également en scène la seconde dimension de La Mouette: le duel entre art nouveau et traditionnel. L’alternance entre musique classique et moderne (hip-hop, électro) en est la prmeière manifestation. La fin est grandiose mais les applaudissement du public peterbourgeois restent timides (comparés par exemple à ceux chaleureux de la veille lors de Don Quichotte du même chorégraphe) et les artistes n’ont droit à aucun rappel. Etrange sanction pour une petite merveille à voir absolument. (note : 9/10).
St-Petersbourg, 9 and plus tard
9 ans après ma découverte de Saint-Petersbourg, la ville garde son charme éthéré et son ambiance à la fois européenne mais avec ce je-ne-sais-quoi de différent, mélange d’atmosphère russe et de grandeur passée mais toujours en suspension dans l’atmosphère, accentué par cette lumière incroyable qu’aucun peintre ne saurait reproduire qui flotte pendant les nuits blanches. Ce qui a changé ? Les batîments rénovés chassent encore plus loin les relents de l’époque soviétique (sans toutefois les faire disparaître… l’arrivée à l’aéroport est là pour rappeler le passé). Mais aussi ces files interminables des touristes que des cars déversent devants les principaux musées et palais et qui sont la preuve que, malgré les préjugés, le tourisme en Russie est aujourd’hui à la portée de tous.
Mais l’expérience reste intacte et cette vision unique des ponts qui s’ouvrent au dessus de la Néva vaut à elle seule le voyage.
Forsythe au Mariinsky
Quel bonheur de retourner au Mariinsky de Saint-Petersbourg après y avoir découvert Boris Eifman en 1998. Cette fois, William Forsythe était à l’honneur en quatre scènes dansées par la troupe du Mariinsky. Résolument moderne, avec une explosion d’émotion et de sensualité dans la quatrième scène In the middle somewhat elevated. Fabuleux et à guetter ses prochaines représentations. Note 10/10.
Zodiac
Le dernier film de David Fincher (Seven, Fight Club) raconte l’histoire d’un serial killer qui a terrorisé la Californie au début des années 70 et qui a failli sombrer dans l’oubli si ce n’est l’obstination d’un dessinateur de journal… Une ambiance d’angoisse réussie mais des personnages trop lisses dont l’histoire saute d’année en année par de simples phrases « xxx mois/ans plus tard » pour traverser à la hâte les 30 ans qu’a duré l’affaire. Qu’est ce qu’on en retient ? Que c’est techniquement irréprochable mais sans grand intérêt. (note 5/10)
Death Proof
Le dernier Tarantino (Death Proof, ou Boulevard de la mort en français) est, selon lui, un hommage aux séries B et Z et aux Grindhouse, ces salles de cinémas « alternatives » remplies de voyous et de prostituées où des films sans budgets mélangeaient violence et sexe pour attirer les foules. Hommage bien entendu truffé de stars et avec la touche Tarantino où de longues scènes de dialogues sont entrecoupées de courtes scènes d’action intense. Sûrement moins dense que Kill Bill, parfois en longueur, peut être un peu plus masculin que d’habitude mais suffisamment « Tarantino » pour être vu. (note 8/10)
Liban, nation martyre
En 1976, Robert Fisk arrive au Liban pour couvrir le début de la guerre libanaise pour le compte du Times. Il ne sait pas encore qu’il passera les prochaines années de sa vie au Liban (où il habite encore) et couvrira (pour le Times, puis pour The Independant quand la ligne éditoriale de Robert Murdoch laisse de moins en moins de place à la critique) un des conflits les plus complexes de la fin du XXème siècle.
Inlassablement, et avec un courage inouï, il brave tous les dangers et malgré et contre tout (bombardements, check points, kidnappings, etc.), il reste là où beaucoup d’autres ont déjà abandonné pour raconter la vérité, non pas celle très partielle des israéliens, ou des palestiniens, ou des divers milices libanaises, mais celle dérangeante où tout le monde est responsable parce que la violence est aveugle de tous les côtés.
Dans une épopée impressionnante de courage et de vérité, Fisk livre dans les 900 pages de Liban, nation martyre un condensé de cette période, entre journalisme et analyse politique, entre espoir et désillusion, mais avec une détermination pour raconter la vérité qui ne peut que laisser bouche bée. D’une tristesse sans fin mais grandiose. (note 9,5/10).
Alexandre Nevsky, Staline & Eisenstein
Un film de propagande tourné par un grand réalisateur ? C’est possible mais il faut se replacer dans les années 30, en plein propagande anti allemande, quand Staline ordonne à Eisenstein de réaliser un film à la gloire d’Alexandre Nevsky en mettant en scène sa victoire contre les chevalier teutoniques qui menacaient la Russie. Le résultat devait être à la hauteur des espérances : des russes courageux avec de bonnes têtes de slaves, des allemands vicieux et cruels habillés en secte de malfaiteurs, et enfin la victoire des bons sur les méchants à grands coups de chants patriotiques. Etrange mais intéressant. ( note 5/10).
Soeur Marie Keyrouz
A Notre-Dame du Liban à Paris ce soir, comme depuis 20 ans déjà, soeur Marie Keyrouz chante les musiques traditionnelles de l’Orient : maronite, byzantine, melkite, araméenne, … « La voix de l’extase » et son Ensemble pour la paix (composé de musiciens et choristes de toutes les religions) sillonne le monde pour prouver que « le chant est l’unique occasion d’exprimer une vérité qui, autrement, serait inaudible ». CDs à découvrir chez Harmonia Mundi.
Pourquoi il ne faut pas aller à Auvers-sur-oise ?
1. La ville où a vécu Van Gogh (30 km au nord de Paris) est entre deux: trop grande pour faire une bourgade mignone, trop petite pour un vrai centre d’attraction
2. Les posters d’oeuvres de Van Gogh accrochés dans les rues confirment que la départementale qui traverse aujourd’hui le village a dû lui ôter tout ce qui lui restait de charme
3. Les bords d’Oise alternent entre friches, fête forraine bruyante et parkings
4. Le seul restaurant qui sert après 14h est une de crêperie sans intérêt
5. Moins vert que le bois de Boulogne, moins beau que l’Ile Saint Louis, moins calme que le Parc Floral
Reste-t-il une bonne raison d’y aller ? Peut être mais elle ne viendra pas de moi.
La femme des sables
Basé sur le roman éponyme de Kobo Abe, La femme des sables de Teshigahara met en scène, en noir et blanc, un promeneur du désert accueilli par des villageois qui lui proosent le gîte chez une femme au fond d’une fosse entourée par des murailles de sable. Au réveil, l’échelle qui lui a servi pour descendre a curieusement disparue. Il est prisonnier de cette femme qui passe ses nuits à ramasser le sable qui s’écoule inexorablement. L’instinct de liberté garde le dessus jusqu’au moment où il se retrouve face à l’échelle que les villageois ont oublié par mégarde… mais a-t-il vraiment envie de partir ?
Interrogation subtile sur la liberté et le sens des actions quotidienne qui, 50 ans plus tard, est encore d’actualité. (note 9/10)